• "Tu n'auras qu'à te fourrer ce poisson dans le fond de l'oreille.

    - Je te demande pardon ?" demanda Arthur sur un ton qu'il estimait plutôt poli. 

    Ford brandissait un petit bocal qui contenait indubitablement un petit poisson jaune. Arthur le considéra en clignant des yeux. Il aurait tant voulu avoir quelque chose de simple et d'identifiable à quoi se raccrocher : il se serait senti plus tranquille si, en même temps que les slips dentrassis, les piles de matelas Sqornshellousiens et l'homme de Bételgeuse qui le conviait à se fourrer dans l'oreille un petit poisson jaune, il avait pu apercevoir rien qu'un petit paquet de corn flakes. Mais il n'en voyait pas et ne se sentait pas tranquille du tout.

    Le guide du voyageur galactique, I.

    (...)

    Reprenons :
    Au commencement, fut créé l'Univers.
    La chose a considérablement irrité tout un tas de gens et bon nombre de personnes estiment même que ce fut une erreur.

    (...)

    - Croyez pas qu'on ferait mieux plutôt d'aller s'inviter à une fête quelconque, en attendant, histoire un peu de voir venir, non ?
    - Pour autant que je sache, répondit la voix éthérée de Gargouillard, j'y suis probablement déjà. Mon corps, tout du moins. Il va toujours à des tas de fêtes sans moi. Il trouve que je suis tout le temps dans ses jambes. Enfin.
    - Mais qu'est-ce que c'est que ce traffic avec votre corps ? s'enquit Zappy, cherchant par tous les moyens possibles à retarder l'échéance du destin - quel qu'il fût.
    "Eh bien... Disons qu'il est très pris. Si l'on veut..., dit Gargouillard avec quelque hésitation.
    - Vous voulez dire qu'il n'en fait qu'à sa tête ?"
    Il y eut un long silence (légèrement glacial) avant que Gargouillard ne se décide à repalrer :
    "Je dois dire, répondit-il enfin, que je considère cette dernière remarque comme d'assez mauvais goût. Enfin peu importe, reprit-il. Vous n'étiez pas censé savoir."
    Il avait pris une petite voix malheureuse.
    "Voyez-vous, poursuivit-il sur un ton que manifestement il avait le plus grand mal à maîtriser, à vrai dire nous sommes actuellement en période probatoire de séparation légale. Et je crains fort que tout cela ne s'achève par un divorce."
    La voix avait retrouvé son calme, laissant Zappy à court de réplique. il bredouilla sans conviction.
    "Je suppose que nous n'étions sans doute pas faits l'un pour l'autre, finit par observer Gargouillard. Nous n'avions jamais l'air heureux de faire les mêmes choses. Nos plus grandes disputes concernaient le sexe et la pêche à la ligne. On a bien essayé à un moment de combiner les deux mais cela ne pouvait que déboucher sur un désastre, comme vous l'imaginez sans doute. et voilà : maintenant mon corps refuse de me laisser rentrer. Il ne veut même plus me voir..."
    Nouvelle pause. Tragique. Le vent battait la plaine.
    "Il me répète que je ne fais rien que l'inhiber. Je lui ai bien fait remarquer que j'étais plutôt censé l'imbiber mais il m'a répondu que c'était bien là le genre de trait d'esprit qui avait le don de vous gonfler un corps si bien que nous en sommes restés là. Je suppose qu'il obtiendra la garde de mon prénom.
    - Oh ? dit Zappy, à peine auduble. Et c'est ... ?
    - Sakhavin. Mon nom est Sakhavin Gargouillard... Tout un programme, non ?
    - Euhhhhhhrrrrmmmm..., dit Zappy, compatissant.

    Le dernier restaurant avant la fin du monde, II.

    (...)

    Arthur hocha la tête et s'assit. Il leva les yeux.
    "Je te croyais mort ..., dit-il simplement.
    - Moi aussi, à un moment, répondit Ford. Et puis j'ai décidé que j'étais un citron, durant une quizaine. Je me suis amusé tout ce temps-là à faire des plongeons dans un gin tonic."
    Arthur se racla la gorge ; puis il recommença.
    "Où... as-tu...
    - Trouvé un gin tonic ? dit Ford, épanoui. j'ai dégotté un petit lac qui se prenait pour un gin tonic et c'est là que j'ai passé mon temps à faire des plongeons. Enfin, j'ai cru qu'il se prenait pour un gin tonic...
    "Il se pourrait...", ajouta-t-il avec un sourire à faire grimper aux arbres l'homme le plus saint d'esprit, "il se pourrait que je l'aie imaginé."
    Il attendit une réaction de la part d'Arthur mais ce dernier se garda bien de réagir.
    "Continue, dit-il d'un ton égal.
    - Le point crucial, vois-tu, expliqua Ford, c'est qu'il est bien inutile de se rendre dingue à essayer de s'empêcher de devenir fou. Tu ferais mieux de laisser tomber et de garder ta santé d'esprit pour plus tard.
    - Et en ce moment, tu es à nouveau saint d'esprit ? dit Arthur. Simplement à titre d'information ...

    La Vie, l'Univers et le Reste, III.


    votre commentaire
  • .
    "J'en crêve trop d'envie, Mary Ann. Le premier crétin venu s'en aperçoit. Quand tu crèves d'envie de quelquechose, personne ne veut de toi. Personne n'est attiré par ... par un tel desespoir."
    .
    (Nouvelles Chroniques de San Francisco - Episode 2)
    .
    .
    .
    Chroniques de San Francisco, c'est le premier "épisode" d'une série de romans. Six pour être précis, qui racontent la vie de quelques personnages, dont le lien est une certaine Mme Madrigal, logeuse dans l'immeuble où ils habitent pratiquement tous à un moment donné du récit.
    Les livres se construisent en un enchainnement de petites scénètes, assez brèves.
    Ce sont des livres très agréables à lire. Où peu à peu on apprends à connaître les personnages, et l'univers dans lequel ils évoluent. C'est vraiment ça qui est agréable, cette impression de dépaysement, de plongeon total dans un univers qui nous est inconnu.On s'y croierait presque, là-bas, à San Francisco dans les années 70, au milieu de tous ces personnages à qui l'on s'attache, pour qui on a peur.
    D'où la frustration qui peut surgir à la fin de certains livres. La frustration qu'ils ne continuent pas indéfiniment et l'impression troublante de perdre de vue des amis chers.
    .

    votre commentaire

  •  

    votre commentaire